Le billet Sidération

Sidération. Les gens de mon âge sont tout simplement sidérés devant la guerre aux portes de l’Europe. La guerre, à défaut d’être une notion abstraite, était au minimum lointaine. L’Afghanistan, l’Irak, la Libye, la Syrie, le Mali… Oui, bon. Mais la voilà, à deux heures de Roissy, aux frontières de l’Union européenne.

La guerre, les parents en parlaient. Et ils nous racontaient des histoires d’un autre temps, que les enfants écoutaient d’une oreille distraite. Surtout quand on entendait le récit pour la vingtième fois. L’occupation des « Boches », les carnets de ravitaillement, le marché noir, les topinambours qui remplaçaient les pommes de terre… Je parle de ceux qui avaient de la chance dans leur malheur. Les autres, les rescapés des camps, ne parlaient pas. Et la voilà, avec les destructions, les amas de béton et de ferraille, la mort aveugle des bombardements, les files de voitures sur des dizaines de kilomètres, les femmes avec leur baluchon sur le dos et leur nourrisson sous le bras. Terrible !

J’ai eu l’honneur et le privilège de suivre les cours de l’Institut des hautes études de la défense nationale (IHEDN). Une sorte de club un peu sélectif où se rencontrent les futurs chefs de l’armée française et quelques civils que l’Institut forme aux questions de défense. Je me souviens d’une des premières leçons. Pour gagner une guerre, il faut trois conditions : des munitions, la logistique et la force morale. Voilà pourquoi la guerre russe, aussi épouvantable qu’elle soit et malgré les destructions qu’elle apporte, paraît mal engagée. Car il manque au moins deux conditions sur trois. Le matériel, les pièces de rechange, l’essence, le ravitaillement n’arrivent pas au front. Et la force morale est manifestement du côté des assiégés.

La force morale, fondée sur des valeurs, est essentielle dans la guerre comme dans l’adversité. Une maxime qui se décline dans tous les secteurs. C’est ce qui sauve aussi les agriculteurs dans leur combat de tous les jours !